Réparation du risque professionnel

La préservation de la santé est un droit fondamental, présent dans la Déclaration universelle des droits de l’homme (1), ainsi que dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (2).

Une mission parlementaire a débuté en juillet 2016 sur la reconnaissance du « burnout » en maladie professionnelle. Dans l’attente de vous présenter le fruit de ces auditions (vidéo ici), nous vous présentons ici le cadre règlementaire qui régit la réparation du risque professionnel en France, dans lequel nous introduisons un paragraphe dédié au recours pour le salarié victime, que nous vous invitons à lire avec attention.

Il s’agit ici du Cadre règlementaire, pour en savoir plus sur les avancées législatives spécifiques aux maladies psychiques, rendez vous sur la page FAUTE INEXCUSABLE de l’EMPLOYEUR.


Cadre règlementaire

1898 (Loi du 9 avril 1898) :

  • adoption du principe d’une indemnisation automatique mais forfaitaire, 
  • indemnisation pour le salarié s’il peut apporter la preuve que l’accident du travail est survenu « par le fait ou à l’occasion du travail »,
  • il n’est pas nécessaire de démontrer la faute de l’employeur,
  • la réparation forfaitaire du préjudice couvre les frais médicaux (pharmacie, hospitalisation etc) mais pas les préjudices corporels (dommages liés aux souffrances physiques, préjudice de carrière etc),
  • en contrepartie, cette réparation est forfaitaire, ce qui veut dire que le salarié victime ne pourra plus se retourner contre l’employeur après règlement de cette indemnisation.


1919 (Loi du 25 octobre 1919) :

  • cette loi étend le régime précité (qui concernait les accidents du travail) aux maladies professionnelles.


1941 (Arrêt du 16 juillet 1941) :

  • cet arrêt de la Cour de Cassation Sociale donne une première définition de la faute inexcusable de l’employeur,
  • dans cette première définition, on entend par faute inexcusable de l’employeur, une faute d’une exceptionnelle gravité. 


1945
(Ordonnances des 4 et 19 octobre 1945 assurant la création du système de sécurité sociale).


1946
(Loi du 30 octobre 1946) :
grâce à un système d’assurance obligatoire pour tous les employeurs, on passe d’une responsabilité individuelle de l’employeur à une responsabilité collective :

  • tous les employeurs doivent souscrire une assurance obligatoire,
  • tous les employeurs cotisent aux caisses de sécurité sociale,
  • les caisses de sécurité sociale procèdent au règlement des indemnités à la place de compagnies d’assurance privées.

Ce système de réparation du risque professionnel est toujours en vigueur aujourd’hui.


2002 (Arrêt du 28 février 2002 – Cour de Cassation) :

  • cet arrêt s’inscrit dans le cadre de la prévention des dangers de l’amiante,
  • cet arrêt considère qu’en vertu du contrat de travail, les employeurs ont une « obligation de sécurité de résultat » envers leurs salariés,
  • la faute inexcusable de l’employeur perd donc son caractère d’exceptionnelle gravité.

Un regard nouveau est porté sur la responsabilité de l’employeur en matière de sécurité au travail, susceptible d’améliorer la législation relative aux indemnisations des victimes de maladies professionnelles.


2002
(Arrêt du 11 avril 2002 – Cour de Cassation)

  • cette obligation de sécurité de résultat est étendue aux accidents du travail.


2010 (Arrêt du 6 octobre 2010, n° 08-45.609 – Cour de Cassation)

  • la Cour de Cassation reconnait qu’un employeur peut manquer à son obligation de sécurité qui l’incombe au travers du « sentiment d’insécurité et d’inconfort » que peuvent éprouver les salariés sur leur lieu de travail.


2012 (Arrêt du 8 novembre 2012, n°11-23.855 – Cour de Cassation)

  • dernière évolution dans le principe d’obligation de sécurité de résultat : la Cour de Cassation estime que la faute inexcusable de l’employeur peut être qualifiée dès lors que l’accident du travail est dû à un stress subi par un salarié subissant une pression liée à une « politique de surcharge » menée par l’employeur.


Recours pour le salarié victime

Le système de réparation du risque professionnel présenté à la rubrique Cadre réglementaire est toujours en vigueur aujourd’hui, offrant des possibilités de recours pour la victime mais ce régime a aussi ses limites :

– la disposition juridique de la présomption d’imputabilité s’organise en faveur du salarié victime d’accident du travail ou de maladie professionnelle (articles L. 411-1 et L. 461-1 du Code de la Sécurité Sociale),

– ces litiges relevant donc de la stricte compétence des juridictions de sécurité sociale, il est interdit à la victime ou à ses ayants-droits d’entamer toute action de droit commun contre l’employeur (article L. 451-1 du Code de la Sécurité Sociale),

– la reconnaissance du caractère professionnel de l’accident du travail ou de la maladie peut être fondé sur cette présomption d’imputabilité mais ne donne pas droit à une réparation forfaitaire,

– c’est donc la Caisse Primaire d’Assurance Maladie, dont dépend le salarié victime de l’accident du travail ou de la maladie professionnelle, qui verse des indemnités journalières jusqu’à la date de guérison ou de consolidation (4). Le versement d’une rente est également possible en cas de subsistance d’une incapacité permanente,

– avec cette prise en charge, le salarié victime ne pourra plus solliciter d’indemnisation auprès de son employeur pour quelque autre préjudice que ce soit.

Important :
Dans ce cas, le salarié victime obtient donc une réparation forfaitaire en échange de la non mise en cause de la responsabilité de son employeur ne peut pas, a priori, prétendre à une meilleure indemnisation.

Mais une indemnisation complémentaire peut cependant être attribuée en cas de comportements fautifs graves de la part de l’employeur : en cas de FAUTE INTENTIONNELLE ET INEXCUSABLE DE L’EMPLOYEUR.

(1) Déclaration universelle des droits de l’homme, article 23, alinéa 1 : « toute personne a droit (…) à des conditions équitables et satisfaisantes de travail ».
(2) Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, article 31, paragraphe 1 : « tout travailleur a droit a des conditions de travail qui respectent sa santé, sa sécurité, et sa dignité ».
(4) Consolidation : terme de sécurité sociale indiquant le moment où la lésion n’est plus susceptible d’évoluer à court terme, elle se fixe et peut être considérée comme ayant un caractère permanent.

Dernière mise à jour le 2 février 2017 (vidéo Mission parlementaire).