Protection de la santé des travailleurs (RPS)

BIEN QUE LE SYNDROME D’EPUISEMENT PROFESSIONNEL SOIT AVANT TOUT UNE MALADIE, EN FRANCE, CETTE PATHOLOGIE EST ASSOCIEE AUX RISQUES PSYCHOSOCIAUX.

DANS UN SOUCI D’OBJECTIVITE, NOUS CONSACRONS DONC UNE PAGE A CETTE DISCIPLINE, EN RAPPELANT QUE LA PREVENTION D’UN RISQUE N’EST PAS LE DEPISTAGE D’UNE MALADIE.

Le syndrome d’épuisement professionnel (« burnout ») est associé aux facteurs de risques psychosociaux d’origine professionnelle (RPS), dont la prévention s’inscrit dans le cadre général de la prévention des risques professionnels.

Nous abordons donc les facteurs de risques psychosociaux dans cette page consacrée à la protection de la santé des travailleurs car il nous permet de rappeler le champ de responsabilités de l’employeur :

la responsabilité de l’employeur en terme de sécurité et de santé est engagée,
l’employeur ne doit pas se livrer à des investigations d’ordre psychologique sur ses salariés,
. l’employeur doit centrer son action sur une analyse des facteurs de risques strictement professionnels.

Notre vocation étant d’apporter une aide pluridisciplinaire aux personnes touchées par l’épuisement professionnel, nous vous engageons à considérer cette présentation comme une simple introduction à la thématique et attirons votre attention sur le fait que la prévention des RPS n’est pas pas la prévention du syndrome d’épuisement professionnel.


DEFINITIONS 
Pour répondre à vos questions en toute objectivité, nous vous proposons tout d’abord quelques définitions à savoir :
un trouble est avant tout l’apparition d’un symptôme physique visible chez une ou plusieurs personnes, comme le stress par exemple, la fatigue, des douleurs musculaires entre autres,

un risque est une probabilité, en l’occurrence, une probabilité que le trouble apparaisse chez une ou plusieurs personnes,

les risques psychosociaux sont décrits comme ayant un caractère « pluri-factotiel » dans la mesure où un salarié ayant été affecté par des événements d’ordre privé est considéré comme plus fragilisé face à ces risques dans l’entreprise (l’un des rôles du CHSCT est d’aider à la clarification des facteurs professionnels pathogènes).

Important : il s’agit de définitions confirmées par les experts de la prévention des RPS ; à l’AFBO, nous considérons que les troubles sont des pathologies, par conséquent, doivent être du ressort de la médecine et que le harcèlement, figurant sur la liste des RPS, a déjà été appréhendé par le droit puisqu’il s’agit d’un délit.


FACTEURS DE RISQUES PSYCHOSOCIAUX PROFESSIONNELS
Il n’existe pas de définition juridique des risques psychosociaux (RPS) en France.

En revanche, il existe 6 facteurs de risques identifiés et autant d’indicateurs recommandés par le collège d’expertise sur le suivi des risques psychosociaux, on parle des indicateurs « Gollac » (1) :

  • la charge cognitive (l’intensité du travail faisant appel aux fonctions liées à la connaissance et régies par le cerveau),
  • la charge émotionnelle (nécessité de cacher ses émotions pour assumer ses fonctions, évoluer en entreprise),
  • le manque d’autonomie (absence de marge de manoeuvre, impossibilité d’exprimer ses souhaits),
  • les relations personnelles (entre collaborateurs, mauvaise ambiance, isolement des salariés),
  • la souffrance éthique (conflit de valeurs entre celles du salarié et celles de l’entreprise par exemple),
  • l’incertitude liée au travail (absence d’écoute des difficultés, ou de systèmes de prévention ou d’alertes).


RISQUES PSYCHOSOCIAUX PROFESSIONNELS
Il n’existe pas de définition juridique des risques psychosociaux (RPS) en France. Mais la notion de RPS recouvre :

  • le stress c’est-à-dire les situations générant un stress ressenti,
  • les violences internes telles que le harcèlement moral, le harcèlement sexuel,
  • les violences externes c’est-à-dire les violences provenant des personnes externes à l’entreprise.

Nous nous permettons de citer une définition des troubles psychosociaux professionnels, proposée par l’ANACT (2) : « les troubles psychosociaux apparaissent lorsqu’il y a un déséquilibre dans le système constitué par l’individu et son système de travail. Les conséquences de ce déséquilibre sont multiples sur la santé physique et psychique ».

Il est à noter que cette définition de l’ANACT, souvent reprises, fait l’amalgame entre les troubles psychosociaux et l’une des définitions du stress proposées par le médecin endocrinologue Hans Selye (1/ « physical, mental, or emotional strain or tension, 2/ « a condition or feeling experienced when a person perceives that demands exceed the personal and social resources the individual is able to mobilize.”

Même si les acteurs de la prévention évoquent le caractère « plurifactoriel » des RPS, tous s’accordent à dire que les facteurs de RPS proviennent de l’environnement de travail comme par exemple, l’intensité du travail et du temps de travail, la mauvaise qualité des rapports sociaux au travail, les conflits éthiques.

Important :
Une exposition prolongée à une situation professionnelle pathogène (surcharge de travail, harcèlement moral notamment) peut également être à l’origine d’un état d’épuisement professionnel.


PREVENTION DES RISQUES PSYCHOSOCIAUX PROFESSIONNELS
La prévention des risques psychosociaux professionnels est un des leviers de sauvegarde de la santé et de la sécurité des travailleurs mais l’action porte davantage sur les conditions de travail et sur les risques que sur les salariés eux-mêmes.

Il existe 3 niveaux de prévention des risques psychosociaux qui permettent de respecter les principes généraux de prévention, prévus à l’Art. 4121-1 et à l’Art. 4121-2 et suivants du Code du Travail.

Nous vous les présentons ici brièvement ces 3 niveaux de prévention des risques psychosociaux :

La prévention primaire : « on prévient »
– un salarié est potentiellement exposé à un danger ou à l’un des facteurs de risque comme ceux précités,
– la prévention consiste à agir sur le risque par la mise en place d’un plan d’actions afin d’éliminer le danger, le facteur de risque,

La prévention secondaire : « on protège »
– il n’a pas été possible d’éliminer le danger ou le facteur de risque, alors on protège le salarié,
– la prévention secondaire consiste à réduire l’exposition au risque en aidant le salarié à faire face (information, formation etc),

La prévention tertiaire : « on répare »
– il n’a pas été possible d’éviter le danger et le salarié est en souffrance, ou a été victime d’un accident,
– curatives plus que préventives, les actions sont axées sur le salarié : soins, prise en charge, orientation vers des professionnels.

Important :
La prévention des risques psychosociaux n’est pas la prévention du syndrome d’épuisement professionnel.


ACTEURS DE LA PREVENTION
Les acteurs internes de la prévention sont :

  • l’employeur : a l’obligation de formaliser l’évaluation des risques psychosociaux dans un document unique dans lequel il doit préciser les plans d’actions et les moyens à mettre en oeuvre pour traiter ces risques,
  • les ressources humaines : ont les qualités les compétences pour repérer les situations de crise ; ils doivent aussi être à l’écoute des salariés en souffrance qu’ils doivent conseiller et soutenir,
  • le CHSCT (comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail) : a compétence pour proposer des actions de prévention, et pour contribuer à rechercher des facteurs pathogènes dans les processus ou l’organisation du travail,
  • les délégués du personnel : disposent d’une procédure d’alerte en cas d’atteinte aux droits des salariés et aux libertés individuelles, et lorsque la santé des salariés est en danger,
  • les médecins du travail : ont un rôle majeur de prévention puisqu’ils doivent écouter et conseiller les salariés, à qui ils peuvent conseiller un arrêt de travail.


REFLEXION SUR LA PREVENTION DES RPS
Dans un souci d’objectivité, nous n’avons pas hésité à évoquer le caractère pluri – factoriel des risques psychosociaux, ainsi défini par les experts. Un autre terme est régulièrement avancé par certains préventeurs lors des débats sur le syndrome d’épuisement professionnel : le sur-engagement.

S’agit il d’atténuer la responsabilité de l’employeur en insinuant qu’une fragilité des salariés ?

Les effets des facteurs de risques psychosociaux ont un impact sur la santé mentale et physique des salariés. La jurisprudence est claire : l’entreprise est responsable de la sécurité physique et mentale de ses salariés.

Quant au concept de surengagement, il a été clairement identifié et se distingue de l’engagement élevé, reconnu comme bénéfique (Mathieu Jodoin, 2001 (4)).


La mise en place d’outils de prévention des RPS est indispensable et même obligatoire pour les entreprises de plus de 1000 salariés (depuis 2008), mais ne peut constituer le seul levier de prévention.

Par ailleurs, à l’heure où le débat sur la reconnaissance des maladies psychiques comme maladies professionnelles se concentre uniquement sur le renforcement de la prévention des RPS (3) il nous parait légitime d’éclairer nos lecteurs sur les questions suscitées par ces approches préventives :

  • quel recul et quels résultats avons-nous sur les plans d’actions mis en place ?
  • quelle est la limite des entretiens menés auprès des salariés et jusqu’ou vont-ils ? s’agit-il d’investigations psychiques ?
  • comment sont utilisés les outils de prévention (questionnaires, entretiens) ? existe-t-il des recommandations d’usage de la part des concepteurs (2) ? sont-elles suivies ?
  • comment est mesuré un facteur de risque comme le stress sachant qu’il s’agit à la fois d’un ressenti et d’un facteur extérieur ? qui et comment sont interprétés les résultats ?
  • comment est évalué le surengagement ? comment est il distingué de l’engagement élevé reconnu comme bénéfique (Mathieu Jodoin, 2001 (4)) ?
  • quelle est la portée juridique de ces rapports devant un tribunal ? servent-ils l’employeur ou le salarié en souffrance ?

Pour la première fois, la DARES (Direction de l’animation de la recherche, des études, et des statistiques) doit rendre un rapport complet sur les risques psychosociaux, rapport commandé par le ministère du Travail.

Vous voulez vous exprimer sur ce sujet, améliorer nos connaissances ou bien témoigner d’une expérience réussie, n’hésitez pas à nous contacter.


PREVENTION DES RPS ET COLLECTE DES DONNEES PERSONNELLES
Avant de vous présenter le cadre réglementaire de la protection des salariés, nous vous rappelons que les principaux outils utilisés par les cabinets de prévention des risques psychosociaux sont des questionnaires soumis aux salariés.

La collecte de données personnelles n’est pas anodine et certains salariés ont déjà saisi la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL).

Nous portons donc à votre connaissance le fait que la question fait partie des thématiques prioritaires des contrôles 2015 de la CNIL, que vous pouvez retrouver aussi sur le site de la CNIL :  

AFBO-CNIL-RPS 2015


PROTECTION DE LA SANTE DES TRAVAILLEURS ET CADRE REGLEMENTAIRE

– Loi du 31 décembre 1991 (modifiant le Code du Travail et le Code de la Santé publique en vue de favoriser la prévention des risques professionnels) : l’employeur a l’obligation d’évaluer les risques éventuels et de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé des travailleurs,

– Le décret du 5 novembre 2001 : l’employeur doit obligatoirement retranscrire dans un document unique l’inventaire des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs dans chaque unité de travail,

La loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 renforce la prévention des risques psychosociaux qui doivent être considérés au même titre que les autres risques professionnels,

– Les principes généraux de la prévention figurent dans les articles L.4121-1 et L.4121-2 du Code du Travail :

          – article L.4121-1 du Code du Travail : L’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent :

1° Des actions de prévention des risques professionnels ;

2° Des actions d’information et de formation ;

3° La mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.

L’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes.

          – article L.4121-2 du Code du Travail : L’employeur met en oeuvre les mesures prévues à l’article L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants :

Eviter les risques ;

Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ;

Combattre les risques à la source ;

Adapter le travail à l’homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé ;

5° Tenir compte de l’état d’évolution de la technique ;

Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n’est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux ;

7° Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l’organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l’influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral, tel qu’il est défini à l’article L. 1152-1 ;

Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle ;

9° Donner les instructions appropriées aux travailleurs.


– Le Code du Travail précise les risques liés au harcèlement moral dans les articles L. 1152-1 à L. 1152-6 du Code du Travail : Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

 

(1) Indicateurs Gollac : indicateurs définis et recommandés par le Collège d’expertise sur le suivi des risques psychosociaux à la demande du Ministre du travail, de l’emploi et de la santé (2007).
(2) ANACT : Agence Nationale pour l’Amélioration des Conditions de Travail.
(3) Texte n° 778 (2013-2014) de Mme Patricia Bordas et plusieurs de ses collègues, déposé au Sénat le 23 juillet 2014.
(4) Mathieu Jodoin, thèse de Doctorat, « Engagement et surengagement au travail : composantes psychologiques, antécédents potentiels et association avec le bien – être personnel », Université de Montréal, Département de Psychologie (2000).


Dernière mise à jour le 20 septembre 2015.